"Qui a intérêt à la prolongation de l’état d’urgence dit sanitaire ?"Jean Valentin Leyama

1er octobre 20200
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Entre nous soit dit, hormis le couvre-feu, les check-points et les contrôles routiers sur lesquels le Gouvernement met l’accent, y a-t-il réellement un plan de riposte contre la pandémie du COVID-19 ? Si oui, en quoi consiste-t-il ? C’est la question que pose Jean Valentin Leyama, ancien Directeur de Cabinet Adjoint du Chef de l’Etat gabonais, et à laquelle,il tente de répondre dans un libre propos.

Les marchés, lieux par excellence de promiscuité sociale et donc, foyers de contamination, sont restés ouverts. Après une longue suspension, les transports en commun ont repris du service au grand bonheur des professionnels du sifflet. Les automobilistes circulent sans masques sauf à l’approche d’un barrage routier, juste pour éviter les emmerdes. Les arrière-boutiques des bars, censés être fermés, continuent de servir leur clientèle, Sobraga tourne à plein régime et les camions de livraison des boissons circulent librement. Les cultes sont célébrés en présentiel, sans sono, les services de renseignements le savent. Les évènements familiaux - mariages, décès - sont organisés selon les formats habituels. On porte le masque dans l’espace public mais on le tombe rapidement dès qu’on est en milieu familier. Moyennant le "coca", on peut parcourir des centaines de kilomètres au-delà de l’heure du couvre-feu. Donc, de l’hypocrisie pour tous et par tous !

Paradoxalement, en dépit de cet incivisme des populations, le taux de contamination ne cesse de diminuer et les autorités de la riposte de s’en gargariser, mettant ces résultats sur le compte de leur plan de riposte. Une étude épidémiologique mérite pourtant d’être lancée afin de comprendre les facteurs de résilience des Gabonais face à cette maladie.

Je repose ma question : en quoi consiste réellement le plan de riposte tant vanté à l’international ? Je circule partout dans le pays, je vais dans les quartiers et les villages, excepté les précautions que les populations prennent désormais elles-mêmes, JE NE VOIS RIEN, ABSOLUMENT RIEN !

Alors, qu’est-ce qui justifie le maintien de l’état d’urgence dont les conséquences économiques et sociales sont, elles, bien réelles ?

J’y vois deux desseins inavoués.

Le premier, c’est ce que Marc Ona Essangui a appelé, le Coronabizness. La pandémie a été une aubaine pour ceux qui la gèrent. Tous ces milliards en plusieurs centaines, reçus à l’occasion, sont passés où ? Les mesures d’accompagnement pourtant financées, n’ont été qu’un feu de paille. Depuis plusieurs mois, la commission d’enquête parlementaire tarde à livrer ses conclusions. Une industrie du COVID s’est créée au profit des acteurs, à l’instar de l’industrie électorale au moment de l’organisation des scrutins. La dernière grosse blague, c’est l’histoire des faux tests, qui est dupe ? Alors qui a intérêt à ce que ce gros business s’arrête ? Qui est fou ? Personne ! Bien au contraire, on va multiplier les arguties pseudo-scientifiques pour perpétuer le mangement.

Le deuxième dessein est plus pernicieux en tant qu’il continue à restreindre les libertés publiques pour les forces opposées au régime. L’interdiction des rassemblements et des manifestations des forces réfractaires au régime permet au pouvoir de faire avaler la pilule des mesures impopulaires, anticonstitutionnelles et anti-démocratiques. En temps normal, par exemple, la dépénalisation de l’homosexualité aurait donné lieu à de grandes manifestations publiques susceptibles de dégénérer en insurrection.

Dans les mois qui viennent, en prélude aux prochaines échéances politiques, l’état d’urgence dit sanitaire va permettre de faire passer plusieurs réformes dangereuses pour la démocratie, en s’appuyant, comme de coutume, sur une majorité parlementaire de godillots.

Fort heureusement, il reste à tous ceux qui désespèrent de voir cette situation prendre fin un jour, un allié redoutable, incontrôlé et incontrôlable par les alchimistes de la conservation du pouvoir à tout prix : le temps, qui n’épargne personne. Mieux, la succession de plusieurs évènements vécus dans le pays, depuis deux ans, à la vitesse d’un kaléidoscope, telle cette pandémie du COVID-19 et d’autres, devrait conduire les manœuvriers à la retenue et au discernement.

Je Vois Loin.
Au Mont Moanda, en ce 30 septembre 2020.
Jean Valentin LEYAMA.

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