Steevel NANI : L’autonomisation des colletivités locales en question

7 novembre 20180
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Steevel NANI,juriste de formation,donne son point de vue sur l’autonomisation des collectivités locales.Et si l’on confiait sa totale gestion aux collectivités ? C’est une des question que le jeune juriste gabonais se pose et qu’il tente de répondre dans ce libre propos.

Libres propos sur l’autonomie financière des collectivités locales au Gabon par Steevel NANI

Le principe voudrait que les collectivités locales s’administrent librement. Cette libre administration des collectivités locales devrait se traduire aussi bien sur le plan fonctionnel que sur le plan de la gestion financière. Les collectivités locales devraient dès lors avoir un budget dont elles ont la totale maîtrise, aussi bien sur le plan de la mobilisation des ressources financières que sur celui de la dépense. C’est tout le sens de la loi 15/96 du 6 Juin 1996 abrogée par la loi 04/2014 relatives à la décentralisation au Gabon.

Ces textes ont été pris en application de l’article 112 de la Constitution aux termes duquel "Les collectivités locales s’administrent librement". Ce n’est là qu’une autonomie textuelle car la réalité au Gabon montre que les collectivités locales peinent à être autonomes. Si l’on considère simplement l’aspect des ressources financières, l’on s’aperçoit que ces collectivités n’ont pas une totale autonomie. Elles n’ont pas de pouvoir de voter l’impôt qui est une prérogative du parlement. Or, l’impôt est un symbole fort dans la libre administration des collectivités locales. Dans la mesure où les collectivités ne peuvent décider de la matière imposable, encore moins fixer le taux de l’impôt, l’on peut se demander à juste titre où est leur autonomie. Pourtant, les collectivités locales perçoivent des ressources financières issues de nombreuses taxes, à l’exemple des taxes municipales.

Cependant, ces ressources financières ne sont pas librement administrées par ces collectivités. C’est en vertu du principe budgétaire dit de l’unicité des caisses que toutes les ressources des collectivités locales sont versées au Trésor public et gérées par le pouvoir central. La procédure de dépense initiée par les collectivités locales obéit alors aux règles de la comptabilité publique. Autrement dit, Il revient au comptable public d’exécuter la dépense que sollicite les collectivités locales dans leur budget.

Il se pose de fait le problème du développement local. Lequel ne peut être effectif que si les collectivités disposent de réels moyens, en particulier financiers. Ce n’est qu’à ce titre que les collectivités pourraient s’administrer "librement". A défaut des solutions juridiques spécifiques et immédiates, il faut s’ en tenir aux éléments de fait pour accélérer l’autonomie des collectivités et par conséquent, le développement des localités décentralisées. Le 31 Décembre 2017 , Le Président de la République Ali BONGO ONDIMBA a pris la décision de doter chaque département du Gabon de un (1) milliard de F CFA : C’est le Fonds initiatives Départementales (FID). Ce fonds est déjà une réponse à l’effectivité de l’autonomie financière des collectivités locales.

Grâce à ce fonds, les collectivités ont une plus grande marge de manœuvre dans leur essor. Si cette solution est salutaire pour l’autonomie des collectivités locales, il reste que la procédure de décaissement donc de la dépense de ce fonds reste un véritable parcours du combattant pour lesdites collectivités. Ces dernières après avoir défini et arrêté les projets jugés prioritaires pour le développement local, devront attendre une multitude de signatures avant de se voir transférer le budget y relatif. Ces signatures partent des autorités déconcentrées (Gouverneur) jusqu’à l’autorité suprême du Gouvernement (Premier Ministre). Par cette lourdeur procédurale, les collectivités locales ne bénéficient pas systématiquement du FID qu’elles n’ont d’ailleurs pas de pouvoir de gestion dans une grande mesure. Et si l’on décentralisait davantage ce fonds ?

Et si l’on confiait sa totale gestion aux collectivités ? L’idée, c’est de raccourcir au maximum la procédure de décaissement de ce fonds en confiant sa gestion aux collectivités locales pour accélérer leur développement. Dans les zones urbaines, subdivisées en arrondissement, on mettra en place un Fonds de Développement d’Arrondissement (FDA) administré directement par la collectivité. Il s’agit tout simplement d’éclater le FID pour le rapprocher des localités les plus décentralisées. Ainsi, le FID pourrait être administré par le Maire central dans un premier temps pour être confié au Maire d’arrondissement. A ce moment, le FID prend le nom de FDA. Quoi qu’il en soit, il faudrait manœuvrer à ce que les collectivités locales accèdent à une réelle autonomie financière. Tel est le gage d’un développement local certain avant l’avènement des décrets d’application de la loi sur la décentralisation.

Steevel NANI
Juriste

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