"Lutte contre le Covid-19 et respect des us et coutumes du Gabon"

24 février 20210
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Depuis plusieurs mois, les Gabonais vivent au rythme des mesures restrictives prises par le gouvernement aux fins, d’une part de freiner la propagation du Covid-19 et d’autre part, de lutter contre cette pandémie très mortelle.

S’il y a lieu ici de saluer la réactivité et la promptitude avec lesquelles les dirigeants ont pris des décisions courageuses certes parfois impopulaires ou douloureuses pour la majorité des Gabonais, il y a quand même nécessité voire urgence de s’interroger sur l’opportunité et l’efficacité de certaines d’entre elles, en l’occurrence la limitation du nombre de personnes devant accompagner un parent décédé à sa dernière demeure hors du Grand Libreville, sachant que pour tout déplacement le test PCR est obligatoire.

Mon libre propos qui ne doit pas être assimilé à une lettre ouverte, a uniquement pour but d’attirer l’attention des gouvernants sur les conséquences que cela pourrait engendrer. Car "gouverner, c’est prévoir".

Il serait judicieux pour ceux qui décident de réévaluer cette décision étant donné que la démocratie participative fait obligation au gouvernement d’écouter les "cris" des autres parties prenantes dans la prise de décisions afin qu’elles soient acceptées par la majorité.

Aux dernières nouvelles, les maisons de pompes funèbres seraient presque saturées dans la mesure où de nombreuses familles ayant déjà établi des programmes d’obsèques ont du mal à se plier à l’obligation qui leur est faite d’annexer une liste de 10 ou 30 personnes à la demande d’autorisation spéciale qui leur permettrait d’aller à l’intérieur du pays avec la dépouille mortelle du parent décédé.

Je voudrais appuyer mon propos en évoquant la province septentrionale dont je connais mieux les us et coutumes. Dans cette partie du Gabon, au corps de garde, les sages(be Gnaboro) répètent toujours ceci : "l’Homme Fang connait principalement organiser deux choses, le mariage et les obsèques".

Or, l’imaginaire populaire sait que les Woleu-Ntémois ne sont enterrés que dans leur "efoussi", c’est-à-dire chez eux. Alors si un Woleu-ntémois de surcroît marié par exemple meurt, il est inimaginable, impossible de penser qu’une petite poignée de personnes ira avec la dépouille au village. Cela s’explique clairement. Le défunt a lui-même trois familles directement : ses familles paternelle et maternelle et sa belle famille. A cela, il faut ajouter les familles maternelles de son père et sa mère, sans oublier les amis et connaissances, les collègues et les frères et sœurs de l’Eglise...

Donc, il faut compter au minimum 50 personnes. Et là encore ça dépend de l’aura de la personne décédée car comme je l’ai écrit en hommage au Premier ministre Emmanuel ISSOZE GONDET, "ta mort ressemblera à ta vie". Autrement dit, les obsèques d’une personne qui a su vivre en parfaite harmonie avec presque tout le monde vont drainer du monde et ce ne serait pas loin de la "remontada".

La lutte contre le Covid-19 est l’affaire de tous. Et il serait imprudent de penser que les populations sont inconscientes de la dangerosité de ce virus mortel. Ce que les populations attendent c’est aussi d’être écoutées et prises en compte dans ce qui est fait quoi qu’on dise en leur nom et en principe dans leur intérêt. Oui, il faut privilégier l’intérêt des populations... Pour le bien de tous !

En ce Temps favorable du carême chrétien, il est plus que nécessaire que chacun soit à l’écoute du prochain, en tenant obligatoirement compte de l’avis de l’autre.

En conclusion, je milite pour la non limitation du nombre de personnes devant accompagner un parent décédé à sa dernière demeure hors du Grand Libreville. Par contre, le test PCR doit être de plus en plus obligatoire pour éviter toute situation désastreuse à notre pays.

Bertin Wilfried MEBA,
Administrateur de santé diplômé de l’ENA/Certificat en Administration et Management du secteur public(MDIS/Singapour).

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