Ted La Machine, à toute épreuve

27 août 20240
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Gabonews est allé à la rencontre de Ted Gwladys Ndong Mvie Omanda, chorégraphe, danseur, photographe, qui a dernièrement ajouté une corde à son arc en devenant poète. C’est à travers son actualité poétique que nous avons échangé avec lui sur le chemin qu’il a parcouru d’hier à aujourd’hui, en lui souhaitant le meilleur pour demain.

Celui que l’on nomme Ted La Machine naît le 17 janvier 1990 à Libreville. Passionné par tout ce qui a trait à l’art, il pratique plusieurs disciplines, mais c’est dans la danse qu’il va le plus s’investir.

Au fil des années, il gagne en expérience et obtient ses galons au sein de la communauté artistique, notamment grâce aux compétitions à travers le continent, où il représente le Gabon, et en remportant au niveau national la première place lors d’événements tels qu’Airtel Beach Battle, Gymnaste de Rue, Urban Battle Dance et XXL.

La Machine ne s’arrête pas là. Il s’investit dans chacune de ses passions et, malgré son handicap auditif, il se transcende à chaque nouvel objectif fixé. Son premier ouvrage, « Handic’Art », un recueil de poésie, témoigne de son engagement à replacer les handicapés au sein de la société et à leur démontrer que tout est possible.

Loin de se laisser abattre par son sort, bien au contraire, Ted nourrit de réelles ambitions dans ses activités, tout en restant conscient que la tâche n’est pas aisée. Il possède un caractère affirmé qui lui permet de garder la tête haute face à toute sorte de pression.

Par tradition

Comment vous rentrez dans la danse ?

L’Art est un don dans la famille, maternelle comme paternelle, tout le monde a un penchant artistique dans le chant, la danse, etc.

Qu’est-ce qui vous fait choisir cette discipline ?

Myené de père, je suis très vite mis en présence de la danse traditionnelle. Au fur et à mesure de mon enfance, à chaque fois que des ondes musicales passent quelque part mon corps réagis. J’ai un profond amour pour la musique et la danse, je ne possède pas une bonne voix pour chanter donc je préfère danser.

Quel est votre parcours dans la danse ?

Je débute officiellement en 2007 à Lambarené. L’année suivante, je suis emmené par mes grandes sœurs, qui sont membres de la chorale La Grâce de Dieu, à faire la rencontre de Scott The Firth, le leader du groupe Eben Dance. Je fais rapidement mes preuves, et témoins de mes capacités à retenir les chorégraphies, les membres du groupe me surnomment La Machine. Un surnom que je garde jusqu’à présent.

Je fais régulièrement des compétitions, certaines que je gagne et d’autres que je perds. En parallèle depuis décembre 2014, j’ai créé mon groupe de danse nommé Street Dance Gabon, dans lequel je forme moi-même des dizaines de jeunes danseurs chaque année.

Je suis actuellement le danseur gabonais représentant de la danse Popping et avec cette catégorie, je suis invité à l’international pour des compétitions. Un danseur de compétition doit financer son billet d’avion, mais je ne peux pas toujours voyager par faute de moyens. Je suis allé trois fois au Cameroun. J’ai une invitation pour participer à la compétition internationale The Last Popper à Douala en décembre prochain, mais encore une fois les moyens manquent.

Street Dancer

Est-ce important pour vous d’être aussi large dans ton domaine d’activité ?

Les personnes ayant des handicaps sont mises au banc de la société, qui ne tient pas compte de leur existence. Nous sommes livrés à nous-mêmes et considérés comme inférieurs.

Nombreux abandonnent très vite l’école, je suis allé jusqu’en Licence 2 Économie (UOB) et Licence 2 à l’Institut de Gestion. Les dossiers traînent dans les administrations publiques comme privées. Les rares entrevues sont bouclées dès qu’un handicap est mentionné.

La danse et la photographie sont pour moi mon travail, bien que dans ce domaine, aussi, la mise à l’écart existe toujours. Les clients préfèrent regarder la grosseur du matériel au lieu de la volonté. Je paye mes factures avec l’argent gagné en dansant et en filmant.

En ce qui concerne Street Dance Gabon, comment ça se passe au niveau des inscriptions et de votre travail avec les plus jeunes ?

Plusieurs fois, j’ai voulu donner les cours, mais les parents ont toujours refusé, car j’enseigne sérieusement et non pour faire passer le temps. De plus, comme je m’entraîne dans le stade Omnisports certains parlent de la sécurité, pourtant, il est surveillé. Les enfants qui sont avec moi sont mes neveux et malgré le travail assez rude, ils ne lâchent pas.

King of Popping

On a eu droit pour la première et dernière fois au Break lors des JO de Paris - est-ce que vous auriez voulu y participer ?

Non. Tout comme à l’école il y a plusieurs matières (maths, français) la danse est sectionnée en plusieurs styles : Hip Hop, Krump, Break Dance, Popping, Afro, etc. C’est uniquement le breakdance qui a été pris, or, je suis spécialisé en popping. Pour ceux qui ne savent pas, Michael Jackson dansait du popping.

Une influence parmi d’autres ?

Non, Michael Jackson n’est pas une influence. Je le cite, car beaucoup ne connaissent pas cette danse. Michael n’a touché que 10 % du popping. Ses chorégraphes étaient les créateurs de la danse popping, issue de la troupe Electric Boogaloo. C’est plus facile pour un profane de se retrouver lorsqu’on cite Jackson. À moins de leur dire que la robotique est juste une base du popping.

Vos influences sont essentiellement traditionnelles ? Si oui, lesquelles précisément ?

Je ne fais pas de différence entre les différentes danses traditionnelles. On sert selon les besoins, mais toutes les danses sont tirées des danses traditionnelles. Le Bwiti en tête puis le Djembé.

Le danseur poète

Quels sont les thèmes abordés dans votre recueil de poésie ? Qu’est-ce qui vous a poussé à l’écrire ?

Mon recueil est une vitrine de la vie pour montrer que tout est un handicap. On va du ras-le-bol social, en passant par la lassitude, des espoirs vains et même des amours inavoués. L’art en lui-même est le moyen de s’exprimer. Ne pouvant pas tout dire avec la danse, je me sers aussi de l’écriture.

Qui sont vos éditeurs et partenaires pour la sortie de ce livre ? Peux-tu nous les présenter ?

Je fais partie du CODAAF (Collectif Des Auteurs Africains) composé de plusieurs écrivains issus de différents pays (Gabon, France, Congo). Je peux citer le fondateur Efry Trytch Mudumumbula ainsi que Nana Anambine, Hermine Jes’s Moussavou, Princesse Loango, Original Wesphal, Clarisse Mabiti, Browny Th’sky, Safna.

Nous avons pour éditeur GNK Éditions qui a été fondé par le fondateur du CODAAF et localisé en France.

Égalité pour tous

Quel est le message le plus important que vous voulez transmettre au sujet des personnes en handicap ? Je pense notamment au message suivant sur Facebook lors de la sortie du livre : En ce jour, une pensée va à l’endroit des handicapés. Prenez courage !

Les handicapés ne sont pas des sous-personnes. S’il est vrai qu’ils ont quelques facultés en moins que la normale, il n’empêche qu’ils en ont d’autres qui leur permettent de combler le vide. Cessons d’avoir peur d’eux et de les mettre à l’écart de la société.

C’est un témoignage par rapport à votre propre vécu ?

Oui.

Vous avez une chaîne YouTube sur laquelle vous partagez aussi bien des chorégraphies que des moments de culte.

Oui, Facebook, YouTube, Instagram, TikTok, vous pouvez m’y retrouver avec le même nom Ted La Machine.

Quel est l’intérêt d’être sur tous ces supports ?

Chacun des réseaux à son type de public. La jeunesse par exemple est sur TikTok, les plus matures sont sur Facebook et Instagram, certains sur YouTube. Une vidéo peut être virale sur Fb et passer inaperçue sur Ig. D’où le besoin de toucher tous les réseaux.

Quels sont vos projets futurs ?

J’aimerais ouvrir une bonne école de danse. En photographie, j’aimerais avoir mon studio. Quant à l’écriture, d’autres livres sont déjà chez l’éditeur.

Vous savez comment mener vos projets ?

Je me débrouille tant bien que mal. Pour la salle de danse comme le studio photo, le souci est de trouver le lieu. Il faudrait qu’il se trouve dans un lieu sécurisé et que j’ai les moyens financiers pour restaurer l’intérieur, puis faire une bonne communication. Donc je bloque sur les moyens financiers.

"Handic’Art" est disponible sur Amazon : https://amzn.eu/d/e37OMKi
Au Gabon chez GNK Éditions à 5.000 F Tél : (+241) 077 853 540 / 06 60 03 80
Également à CNM Chez Nous-Mêmes Librairie à 5.000 F Tél : (+241) 074 352 703 / 062 454 992

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